‘Mickey’ Artiges, demonstrateur belge du f-16

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Florennes, 3 novembre 2008. De 2006 à 2008 inclus, c’est-à-dire durant trois saisons de meetings aériens, le Commandant Michaël « Mickey » Artiges a été le démonstrateur officiel du F-16AM Fighting Falcon de COMOPSAIR (composante aérienne des forces armées belges). Appartenant à la 1ère escadrille du 2ème wing tactique, Mickey Artiges a pris la suite du Commandant John Vandenbosch de la 31ème escadrille du 10ème wing et cette succession était pour le moins hasardeuse, vu la grande qualité de sa présentation… Mais le Commandant Artiges à su relever le défi avec brio, confirmant ainsi l’excellence de la déjà longue lignée des démonstrateurs  belges de F-16 !

Entraînement au vol « heritage flight » effectué en juillet 2008 : aux commandes du F-16AM FA-131, le Commandant Michaël « Mickey » Artiges, tandis que le P-51 Mustang est piloté par son ami Frédéric Voormezeele.

Petite bio express
Michaël Artiges est entré à la Force Aérienne en 1993 après une enfance et une adolescence imprégnées d’aviation, car son père a toujours été un fana des choses de l’air. Après sa formation de base sur SIAI-Marchetti SF 260 en 1995, il passe sur Alphajet en 1996 et est transformé sur F-16 aux USA. Après un passage à l’OCU (Operational Conversion Unit) au 10ème wing de Kleine Brogel, il est affecté en 1997 à la 350ème escadrille qui vient tout juste d’être transférée au 2ème wing de Florennes. Il passe ensuite en 2002 et pour trois ans à l’évaluation opérationnelle du F-16 au niveau de COMOPSAIR pour être versé début 2006 à la 1ère escadrille à laquelle il appartient toujours. Au moment d’entamer sa première saison de démonstration du F-16, soit début 2006, Michaël Artiges totalisait 2.200 heures de vol (dont 1.800 sur F-16) et trois ans plus tard, soit fin octobre 2008, il a 2.550 heures de vol au compteur (dont 2.150 sur F-16).

Le Commandant Artiges dans le cockpit d’un F-16AM début novembre 2008. A noter : le badge au chardon de la 1ère escadrille sur sa veste de vol et le souhait « bon vol » peint par les mécanos juste au bord de la carlingue.

Un programme très dynamique
Lorsque Mickey Artiges a soumis, au printemps 2006, son programme de démonstration acrobatique à l’état-major de COMOPSAIR, il venait de passer à la loupe les présentations des monoplaces de hautes performances des 20 dernières années afin d’élaborer son show (avec variantes beau et mauvais temps) dans une optique d’originalité mais, quoi qu’il en soit, avec des figures demeurant dans l’enveloppe de vol du F-16. Il a également pris garde à choisir des manœuvres qui puissent captiver et – disons le tout de go, émerveiller – le public des fêtes aériennes tout en suscitant l’attention des fanatiques de tous acabits et l’intérêt des spécialistes (pilotes, personnels techniques) qui font immanquablement partie de l’assistance de tout meeting aérien…

M. Artiges à Florennes le 3 novembre 2008, de retour de l’exercice Green Flag en Arizona et avant de repartir vers l’Amérique pour ses dernières présentations les 5 et 6 novembre à Nellis Air Force Base.

La caractéristique fondamentale du programme de Mickey Artiges réside dans l’agilité avec laquelle les figures s’enchaînent sans à-coups ni recours abusifs à la puissance et à la post-combustion, malgré le côté spectaculaire du phénomène qui « déchire » le public. Ce programme comporte, outre les passes  slow/low et low/fast, une petite vingtaine de figures et dure effectivement 11 minutes 30 secondes, ce qui est la durée optimale d’une présentation acrobatique pour un avion à hautes performances. L’altitude de départ de la présentation est de 500 pieds (150 mètres) par rapport au sol et constitue le point le plus bas pour les figures dans le plan vertical, celles se développant dans le plan horizontal se faisant à cette altitude ou plus haut, sauf les passes en vol lent (slow) et en vol rapide (fast) qui se font généralement à 200 pieds (60 mètres) du sol.
Michaël Artiges entame son show par un 8 cubain (2 loopings consécutifs avec changement de direction aux ¾ de chacun d’eux) avec repositionnement dans l’axe et sur le dos pour effectuer un tonneau à 4 facettes, suivi d’un retournement (split S) et de trois tonneaux aux ailerons. Après un virage serré sous G, il se positionne à 45° du public pour effectuer un tonneau barriqué à coefficient G élevé, remise en vol en palier et virage de 225° pour amener le F-16 face au public. Il effectue alors un demi-looping  et enchaîne un tonneau rapide qui se finalise en 8 à plat, puis une oreille, comme on dit chez les Français (un « derry turn » comme on dit chez les Belges et, en réalité, un demi huit paresseux) en oblique à 90° du public.

Les traînées de condensation générées à l’emplanture des ailes dénoncent le virage effectué sous fort facteur G par Mickey Artiges ; Coxyde 28 août 2008.

Vient ensuite l’un des moments favoris des spotters photographes, c’est-à-dire la passe « low & slow » ou à basse altitude et à faible vitesse (à 60 mètres du sol et à 105/110 nœuds (195-205 km/h)). A l’issue de celle-ci, il allume la post-combustion, exécute un virage à 360° (un cercle parfait) et jette le F-16 dans un tonneau barriqué sous fort facteur G pour éloigner rapidement l’avion du public et le cabrer en montée verticale ; une oreille en descente l’amène en parallèle au public à 600 nœuds (1.100 km/h) pour sa passe plein pot à basse altitude. Montée à la verticale pour casser la vitesse et plein réduit, il pique sous un angle de 90° et se rétablit après avoir encaissé moins 3,5G (limite imposée, du reste, par l’ordinateur de bord), s’ensuit un retournement entamé avec le nez cabré à 60° qui l’amène aligné à 500 pieds dans l’axe de présentation qu’il parcourt intégralement sur la tranche (knife flying), figure simple en apparence mais qui exige une absolue maîtrise de pilotage… Un carré exécuté face au public se poursuit par une montée à 10.000 pieds (3.000 mètres) agrémentée d’une noria de tonneaux dans le plan vertical avec basculement au sommet et descente en tire-bouchon jusqu’à 500 pieds (150 mètres). Et c’est le break de fin de présentation pour rejoindre le circuit et venir atterrir…
Cet ensemble et enchaînement de séquences n’ont pratiquement subi aucun changement durant les trois ans, hormis le tonneau à 4 facettes qui a été entamé sur le dos lors des 2ème et 3ème années. Une autre modification, très spectaculaire, a été inaugurée lors des journées de la défense en juillet 2008 à Florennes, lorsque Mickey Artiges a réalisé une sorte de « heritage flight » en compagnie de Frédéric Voormezeele au commandes d’un P-51D Mustang de la dernière guerre… Cette formation inusitée de deux générations de chasseurs a été goupillée un peu par hasard et surtout parce que Mickey Artiges et Frédéric Voormezeele sont de vieux copains…

Vol sur la tranche (knife flying) révélant l’élégante et sobre livrée du FA-131, l’appareil utilisé par M. Artiges pour ses démonstrations lors des journées de la défense les 5 et 6 juillet 2008 à Florennes.

Un avion qui ne procure que des satisfactions
Le F-16 Fighting Falcon est en service à la Force Aérienne depuis 1979, mais le mid-life update (modernisation) du milieu des années 90 et toutes les modifications et amendements appliqués régulièrement en font une machine de combat toujours en pointe. Conçu comme un chasseur hautement manoeuvrable, le F-16 s’avère être un appareils extrêmement agile dans tous les plans et donc particulièrement apte au combat tournoyant (dogfight) et qui, en plus, jouit d’un exceptionnel rapport poids/puissance… La fiabilité mécanique du F-16 est telle que Mickey Artiges n’a eu à déplorer l’abandon que d’un seul vol de présentation suite à un incident technique. Le F-16 demeure donc encore et toujours un des meilleurs avions de combat à l’aube du 21ème siècle…

Florennes 06 juillet 2008, un salut amical de Mickey Artiges qui s’en retourne au paddock.

Moments palpitants
Mickey Artiges prétend avoir vécu beaucoup de moments sous adrénaline, mais essentiellement à caractère positif, lors de ses trois ans comme pilote démonstrateur du F-16. Il y en eut cependant un qu’il qualifie d’inquiétant… Lors d’un entraînement en début de saison, il a vécu une sortie de bouche (looping) des plus stressantes, car à moins de 10 mètres du plancher des vaches (certains témoins parlent même de 2 mètres). Un débriefing hyper pointu a permis d’éviter définitivement que ce type de situation angoissante ne se répète, tant il est vrai que les erreurs bien analysées sont autant d’apprentissages salutaires.
Dans un registre plus exaltant, la reconnaissance dont il fait l’objet dans le circuit des meetings aériens lui a donné l’opportunité de voler en « backseat » avec les patrouilles de France, de Suisse, Breitling et les Red Arrows de la RAF

Dernier « heritage flight » des journées de la défense 2008, le P-51D de Frédéric Voormezeele et le F-16AM de Mickey Artiges ont terminé leur show.

Que de bons souvenirs
Malgré le côté « one man show », c’est-à-dire qu’il doit seul s’occuper de tout, en l’absence d’un manager ou coach qui ne serait pas superflu, Mickey Artiges ne retient que de bons souvenirs de ses trois saisons au devant de la scène des fêtes aériennes. Il y a le « bon stress » ressenti en prélude à toute présentation mais surtout, comme il l’avoue volontiers avec la modestie et la gentillesse qui lui sont typiques, il doit sa réussite en tant que pilote de démonstration, laquelle est unanimement reconnue, grâce au soutien total de sa famille, son épouse, son fils de 10 ans et sa petite fille de 3 ans et demi sont en effet ses supporters les plus ardents. Mais son succès est, dit-il, imputable pour l’essentiel à l’équipe des mécanos et des armuriers qui le supportent lors de chaque démonstration, lesquels tout autant que lui le font bénévolement et en sus des prestations et des travaux normaux requis par le service. Mickey Artiges leur en est profondément reconnaissant, de même qu’il l’est vis-à-vis de tous ceux qui l’ont aidé d’une manière ou d’une autre et, à ce propos, il ne tarit pas d’éloges pour l’European Air Show Council présidé par Gilbert Bueckenbergh.

Décollage avec fumigène et post-combustion de Mickey Artiges pour une présentation à Kleine Brogel le 17 juillet 2007.

Excellent pilote autant qu’ambassadeur de COMOPSAIR et des ailes belges, Mickey Artiges n’hésite pas à aller au contact du public, particulièrement les jeunes, avec une disponibilité et une gentillesse rarement atteintes par les pilotes qui sont les vedettes des meetings d’aviation.
Il a entamé sa première saison en Tchéquie en 2006 et termine la troisième et dernière les 5 et 6 novembre 2008 à Nellis Air Force Base dans le Nevada où, en l’absence de F-16 de l’USAF, il y volera la vedette ! Une fin en apothéose méritée pour ce sympathique pilote.
Pour avoir enthousiasmé les foules d’une cinquantaine de fêtes aériennes et nous avoir fréquemment donné de bonnes vibrations, merci Mickey !

Texte et photos: Jean-Pierre Decock

Picture of Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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