L’année 2012 des F-16 flamboyants

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Bruxelles, le 30 décembre 2012. L’année se termine et force est de constater qu’elle fut prolifique en F-16 revêtus d’une décoration spéciale flamboyante tant les anniversaires ou circonstances spéciales furent au rendez-vous. Toutes les escadrilles des deux wings opérationnels sur F-16 avaient au moins une bonne raison de pavoiser et de montrer leurs couleurs au firmament.

 

Au décollage avec pleine post-combustion de Kleine-Brogel le 4 décembre 2012, le F-16BM FB-24 spécialement décoré pour célébrer le 25ème anniversaire de l’OCU F-16 à l’emblème du vautour de l’ex-école de chasse. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

La 1ère escadrille à l’emblème du chardon

A tout seigneur, tout honneur : la 1ère escadrille, parrainées par la ville de Chimay, célébrait en 2012 les 95 ans d’existence du chardon d’Ecosse, emblème dont cette escadrille hérita lors de sa constitution en tant que 351 squadron en 1946 et puis 1ère escadrille en 1948 sur Spitfire MK XIV au sein du 2ème wing de la base de Florennes alors en gestation. Elle fut équipée ultérieurement de F-84E et G Thunderjet et de F-84F Thunderstreak. Convertie sur Mirage V en 1971, elle quitta l’Entre Sambre et Meuse pour former, avec la 8ème escadrille, le 3ème wing tactique de Bierset. Elle réintégra Florennes en mars 1989 après sa transformation sur F-16A qui, après de nombreuses modernisations, demeure toujours sa monture de nos jours.

 

Le FA-121 commémorant les 95 ans du chardon, l’emblème de la 1ère escadrille, lors de son atterrissage à Waddington en juillet 2012. (via Jean-Pierre Decock)

C’est en octobre 1917 que fut constituée la 1ère escadrille à l’emblème du chardon, elle était basée aux Moëres et dotée de Nieuport XI et XVI remplacés progressivement par des Hanriot HD-1 à partir de l’automne de cette même année. Depuis lors, le chardon fut, sous de nombreuses variantes graphiques, fièrement porté sans discontinuer par des chasseurs, malgré la grande variation dans les numérotations des escadrilles. Par exemple, au début de la 2ème guerre mondiale, les Hurricane MK I de la 2ème escadrille basée à Schaffen-Diest exhibaient un superbe chardon enserré par un ceinturon sur leur camouflage typiquement britannique.

Gros plan fait à Florennes le 23 juin 2012 de la dérive du FA-121 à livrée spéciale 95 ans : côté droit, le chardon emblème de tradition et la devise de la 1ère escadrille du 2ème wing ainsi que son indicatif radio « stingers » utilisé depuis son intervention en ex-Yougoslavie au milieu des années 90; à gauche, le « côté obscur de la force ». (Jean-Pierre Decock)

L’emblème avec sa devise « Nemo me impune lacessit » (Personne ne me provoque impunément) vit et vole donc depuis 95 ans au sein de l’aviation militaire belge et a été porté au combat récemment lors des interventions en ex-Yougoslavie, en Afghanistan et en Lybie. La 1ère fêtera bientôt son centenaire, un fait unique dans les annales de l’aviation belge. Nul doute qu’alors l’emblème concordera avec son dessin antique simplifié aux contours d’un bouchon de champagne…

La 349 à l’emblème du goedendag

Le 349 squadron fut la deuxième escadrille belge créée au sein de la Royal Air Force durant la 2ème guerre mondiale. C’est en effet en octobre 1942 que furent rassemblés les pilotes constituant le noyau de cette nouvelle escadrille destinée à la protection du Congo Belge. Les effectifs presque complets de l’unité débarquèrent à Ikeja au Nigéria le 10 novembre 1942 et y perçurent des Curtiss P-40 Tomahawk en dotation.

 

La décoration inusitée du FA-110 appliquée en août 2012 pour le 70ème anniversaire de la constitution du squadron 349 au sein de la RAF comme l’indique le Spitfire ornant la dérive en surimpression du goedendag (masse d’armes), emblème de l’escadrille, de même que la reprise du squadron code GE propre à la 349 durant la guerre (X étant la lettre individuelle de l’avion). (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

L’escadrille fut officiellement constituée le 11 janvier 1943 et couvrit les opérations de convoyage des avions débarqués sur la côte ouest de l’Afrique vers l’Egypte après la traversée du continent africain pour aller renforcer la Desert Air Force. Après que les forces de l’Axe eurent été boutées hors d’Afrique du Nord, la 349 plia bagages et s’en revint en Grande-Bretagne pour être reformée à Wittering le 7 juin 1943. Equipée de Spitfire MK V et puis MK IX, elle prit part au débarquement de Normandie et fut même la première escadrille alliée à atterrir en France à Sainte-Croix-sur-Mer dès le 10 juin 1944, soit quatre jours après cette opération militaire qualifiée de plus grande de tous les temps. La 349 termina la guerre à Valperbusch en Allemagne septentrionale pour rejoindre la 350, son escadrille sœur, à Wunstorf et ensuite à Fassberg avant de venir se fixer à Beauvechain le 24 octobre 1946. C’est sur cette base célèbre du 1er wing de chasse que le squadron fut rééquipé en Spitfire MK XIV et puis devint, en 1949, la première escadrille belge déclarée opérationnelle sur avion à réaction, en l’occurrence le Gloster Meteor MK IV. Dotée successivement de Meteor MK VIII, Hunter MK IV, Avro Canada CF-100 MK V, Lockheed F-104G Starfighter et enfin F-16A jusqu’à la dissolution du 1er wing de chasse le 31 mars 1996. C’est suite à cette réorganisation que la 349 fut réaffectée au 10ème wing de Kleine-Brogel où elle est basée depuis et équipée de F-16AM ayant subi plusieurs chantiers de modernisation.

 

Gros plan sur la dérive du FA-110 montrant le raffinement graphique de la décoration appliquée pour le 70ème anniversaire de la 349. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

Son emblème au goedendag (la masse d’armes des milices flamandes qui défirent le roi de France en 1302) et sa devise « Strike hard, strike home » (frappe fort, frappe juste) célèbrent donc les 70 ans d’une histoire fertile en rebondissements.

 

Belle formation en échelon refusé à gauche de F-16AM de la 349 avec le FA-110 menant les FA-135/70/69 en août 2012. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

La 350 à l’emblème d’Ambiorix

Le premier squadron belge de la RAF fut le 350 constitué le 10 novembre 1941 mais qui ne fut officiellement créé que lorsque ses effectifs furent complets, soit en date du 11 février 1942, sur l’aérodrome londonien de Northolt. La 350 a, du reste, dignement célébré son 70ème anniversaire en novembre 2011 à Florennes (voir article sur ce site « archives impressions » – « Three-fifty’s seventy »). Nous considérerons que cette escadrille a fêté l’événement avec quelques semaines d’avance sur 2012…

 

Le motif appliqué sur la dérive du FA-68 de la 350 fin 2011 à l’occasion du 70ème anniversaire de sa création illustre avec beaucoup de modernisme l’emblème du squadron, soit le casque ailé d’Ambiorix, quoi qu’il figure dans un esprit plus bandes dessinées sur les quilles ventrales de l’avion. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

Equipée de Spitfire MK IIa et puis Vb, elle participa à la tristement célèbre tentative de débarquement à Dieppe le 19 août 1942. Ayant perçu des Spitfire MK IX, la 350 redoubla d’activités offensives sur le Nord de la France et participa aux opérations du débarquement en Normandie. Après une conversion sur Spitfire MK XIV en août 1944, la 350 se livra au sport dangereux qu’était la chasse aux bombes volantes V1. Basée à Celle en Allemagne, les pilotes de l’escadrille abattirent en collaboration l’un des nouveaux et rarissimes bombardiers à réaction de la Luftwaffe Arado Ar 234 le premier mai 1945.

 

Le FA-68 décoré spécialement pour les 70 ans de la 350ème escadrille avec les FA-129 et 131 comme ailiers en novembre 2011. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

Rééquipé en Spitfire MK XVI, le squadron rejoignit la 349 à Fassberg en novembre pour rentrer au pays le 24 octobre 1946. Etablies à Beauvechain, la 350 et la 349 formèrent le 1er wing de chasse et, malgré la saine émulation régnant entre elles, elles eurent des destins assez parallèles jusqu’à la dissolution du 1er wing le 31 mars 1996 qui amena l’intégration de la 350 au 2ème wing de Florennes qui est toujours son port d’attache à l’heure actuelle.

Dès sa création, les pilotes choisirent pour emblème Ambiorix, chef des Eburons, connu de tous les écoliers belges pour sa résistance acharnée à l’envahisseur romain; la devise choisie fut une citation empruntée à Jules César, à savoir « Belgae gallorum fortissimi » (de tous les peuples de la Gaule, les Belges sont les plus braves). Le squadron a donc bien fêté ses 70 ans durant pratiquement tout 2012 avec un appareil à décoration spéciale évoquant – comme on peut le deviner – Ambiorix au casque ailé représenté comme toujours avec de belles bacchantes tout ce qu’il y a de plus gaulois.

L’OCU F-16 à l’emblème du vautour

L’Operational Conversion Unit F-16 a été constituée en escadrille (alors qu’elle était auparavant flight de conversion) officiellement le 1er septembre 1987 à Beauvechain et devenait du même coup héritière de l’emblème de la défunte école de chasse : le vautour tenant dans ses serres une flèche à triple pointe. L’OCU ainsi constituée et renforcée de nombreux instructeurs chevronnés était prête à recevoir les promotions de jeunes pilotes fraîchement brevetés sur Alphajet, mais aussi le fort contingent de pilotes de Mirage du 2ème wing rééquipé en F-16 à partir de mars 1989.

Au total, l’OCU F-16 et ses biplaces F-16B ont permis de former au fil de ces 25 ans plus de 300 pilotes essentiellement belges, mais aussi portugais, turcs, norvégiens et même jordaniens. Les appareils qu’elle a en dotation ont été modernisés et leur électronique remise à jour à plusieurs reprises, ce qui les maintient au top en termes opérationnels.

 

Cette vue en plongée sur le F-16BM FB-24 effectuée le 4 décembre 2012 montre bien la décoration à damiers frappée du vautour, emblème de l’OCU F-16 peint pour le 25ème anniversaire de sa création en tant qu’escadrille autonome. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

A la dissolution du 1er wing de chasse à Beauvechain le 31 mars 1996, l’OCU F-16 fut intégrée au 10ème wing et fit mouvement sur Kleine-Brogel qui est encore toujours son port d’attache en 2012. L’OCU fête donc son quart de siècle d’existence. Cette unité prestigieuse compte dans ses ranges le premier pilote du monde à passer le cap des 1.000, 2.000 et 3.000 heures de vol sur F-16 : le Commandant Aviateur Jean-Marie « Toutou » Toussaint ainsi que bon nombres d’instructeurs titulaires de 1.000 ou 2.000 (voire, mais plus rarement, 3.000) heures aux commandes de cet avion de combat.

La 31ème escadrille à l’emblème du tigre

La 31ème escadrille, de par son statut de « tiger squadron », décore virtuellement un avion chaque année d’une livrée tigrée pour sa participation au Tiger Meet de l’OTAN regroupant depuis 1961 les escadrilles ayant ce redoutable félin pour emblème.

 

Le FA-87 dans son décor Tiger Meet 2011 atterrissant à Coxyde le 5 juillet 2011; les motifs sur la prise d’air représentent les sept « Silver Tiger Trophy » remportés par la 31ème escadrille et le 60 sur la dérive célèbre son 60ème anniversaire. (Jean-Pierre Decock)

Formée en 1951 à Beauvechain, la 31ème escadrille fêtait donc son soixantenaire en même temps que le cinquantenaire du Tiger Meet en 2011. Pour l’occasion, les artistes de la 31ème avaient imaginé une superbe livrée de tigre du Bengale au pelage fauve se déclinant vers l’avant de l’avion en tigre de Sibérie au pelage gris et blanc. Ce motif très judicieux peint en 2011 ne fut que peu altéré pour la participation de l’escadrille au Tiger Meet qualifié d’Artic Tiger qui se tenait du 29 mai au 8 juin 2012 sur la base norvégienne d’Orland, repaire du 338 tiger skvadron. Les retouches consistèrent essentiellement à éliminer les chiffres 60 (ans de la 31ème escadrille) et 50 (ans de tiger meet de l’OTAN) apposés en grand de part et d’autre de la dérive et à les remplacer par 31.

 

Le même FA-87 à la décoration retouchée en mai 2012 (le 60 de la dérive a été remplacé par le 31 de l’escadrille) pour sa participation imminente au Tiger Meet à Orland (Norvège) fin mai – début juin. Les rayures de tigre courent étalement sur l’intrados et le ventre de l’avion. (Jean-Pierre Decock)

Par contre, les peintres du squadron ont apposé huit marquages consacrant autant de « Silver Tiger Trophy » gagnés depuis 1978 en tant que « overall best squadron during the Tiger Meet ». C’est incontestablement la 31ème escadrille de Kleine-Brogel qui est en tête de classement en termes d’attributions de ce trophée éminemment convoité par tous les participants. Parallèlement, les mécanos de la 31ème furent mis à l’honneur en recevant le « Special tiger spirit award » pour leur grande motivation lors de bon nombre de ces exercices OTAN, du reste, le senior d’entre eux en était à sa 26ème participation.

 

Le FA-87 lors du meeting de Florennes le 23 juin 2012; la trappe de la roulette de nez mentionne les noms des concepteurs de la décoration (Wolfs & Verheyen) et son exécution par l’atelier de peinture du 10ème wing. Les symboles de « Silver Tiger Trophy » peints côté gauche de l’entrée d’air sont dorénavant huit. (Jean-Pierre Decock)

Tant de glamour n’a pas empêché l’escadrille de prendre une part active aux missions à l’étranger ces dernières années. La 31ème escadrille à l’emblème du tigre et dont la devise est « In sanguine vinum » (mon vin, c’est le sang) méritait donc effectivement une place de choix dans le présent article.

F-16 démo

Ce compte-rendu serait incomplet sans l’évocation du F-16AM spécialement décoré pour le démonstrateur officiel de la Composante Air, le Capitaine Aviateur Renaud « Grat » Thys de la 350ème escadrille du 2ème wing. L’appareil et l’équipe de démonstration au grand complet ont fait l’objet d’un article sur le présent site fin mai 2012 (archives articles – « Cocardes et talents »).

La décoration de l’avion montre bien les couleurs nationales et la découpe plutôt géométrique des aplats de couleur met bien en exergue les lignes aérodynamiques du F-16. Présenté officiellement le 22 mai 2012, ce F-16 au décor évoquant l’origami a fait le bonheur des spectateurs de nombreuses fêtes aériennes en Belgique au cours de la saison 2012.

 

Intrados et extrados du F-16AM FA-84 à décoration spéciale « façon origami » utilisé par le démonstrateur F-16 de la Force Aérienne, le Capitaine Renaud « Grat » Thys de la 350ème escadrille du 2ème wing. (IPR-Comopsair / Adj. Bart Rosselle)

 

L’année 2012 fut donc exceptionnellement fertile en décorations de F-16 et chaque escadrille de chasse de la Composante Air a bombé le torse et y est allée de son « cocorico » pour le plus grand bonheur des passionnés et fanas d’aviation, mais surtout des maquettistes qui en feront une année faste à marquer d’une pierre blanche.

Jean-Pierre Decock

Remerciements à l’Adjudant Bart Rosselle d’IPR-Comopsair pour son assistance totale en matière de photos air-air.

Picture of Jean-Pierre Decock

Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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