Le Bourget, 19 juin 2013. Le Salon du Bourget vient de cloturer sa cinquantième édition, et c’est vraiment un excellent cru. Plus de 2.100 exposants venus de 45 pays, 150 avions exposés, 130.000 m2 de stands, ont attiré du 17 au 23 juin plus de 150.000 visiteurs professionnels, et plus de 3.000 journalistes. Et la Belgique y était non seulement bien représentée, mais a aussi remporté de brillants succès commerciaux et présenté des produits innovateurs.
Le stand « Belgian Aerospace » disposait d’un lieu de rencontre convivial permettant aux exposants de rencontrer leurs visiteurs autour d’un café. |
Une soixantaine d’entreprises belges exposait dans un stand commun dans le Hall 2B et recevait ses hôtes de marque dans un chalet en bord de piste. La traditionnelle « journée belge » s’est déroulée le mercredi 19 juin, et une délégation officielle s’est rendue à Paris en Embraer de la Force Aérienne Belge. Alors que la Région Wallonne était représentée par deux ministres (Jean-Claude Marcourt, ministre de l’Economie, et Philippe Courard, ministre de la Politique scientifique), aucun ministre flamand n’avait fait le déplacement malgré l’importance du secteur en terme d’emplois. Ces différences de politiques régionales au niveau des gouvernements n’empêchent pas, que du contraire, le pragmatisme et la collaboration nationale entre industriels belges de toutes les régions, la complémentarité de leurs spécialisations étant un atout important pour l’obtention de certains contrats.
Embraer a annoncé le lancement de la deuxième génération de ses « regional jets » et exposait un E-190 aux couleurs de Air Astana, la compagnie nationale du Kazakstan. |
C’est notamment le cas du plus gros contrat annoncé, qui bénéficie à la Sonaca (www.sonaca.com) , mais aussi à Asco Industries (www.asco.be), dans une répartition 60/40. Ils vont fournir à Embraer les becs de bord d’attaque (slats) et les volets (flaps) de la nouvelle génération de regional jets du constructeur brésilien. Embraer (www.embraercommercialaviation.com) a en effet annoncé au Salon le lancement de la famille E-2 de ses biréacteurs régionaux E-175, E-190 et E-195. Le E-190 E2 sera le premier à entrer en service en 2018, et bénéficiera d’un allongement du fuselage, portant la capacité maximum à 114 passagers. Le E-195 E2 suivra en 2019 (maxi 144 passagers) et le E-175 E2 (maxi 90 passagers) en 2020. Cet allongement de fuselage s’accompagne d’une remotorisation en geared turbofan de la nouvelle génération de Pratt & Whitney, respectivement les PW1700G pour le E-175 E2, et les PW1900G pour les E-190 E2 et E-195 E2. Et d’une nouvelle avionique Honeywell Primus, de commandes Fly-By-Wire (FBW) de la quatrième génération et d’une nouvelle voilure. Plus de 300 commandes et intentions d’achat ont été annoncées au Salon pour ces nouveaux avions. Et la prévision de production totale sur un peu plus de dix ans est d’un millier de machines, ce qui représente pour la Sonaca un contrat d’environ un milliard de dollars, soit près de 20% du chiffre d’affaires de l’entreprise wallonne. La Sonaca devient ainsi le second plus important partenaire d’Embraer sur ce programme, le premier étant le constructeur des moteurs Pratt & Whitney (P&W).
Outre les ténors de notre industrie aérospatiale (Asco Industries, Barco , FN, Sabca, Sonaca, Techspace Aero), un grand nombre de PME profitait des opportunités de contacts professionnels du Salon pour vendre un savoir-faire reconnu tant en fabrication métallique de précision, qu’en matériaux composites, en motorisation et en équipements et services divers. Il est malheureusement impossible de les citer tous, mais deux d’entre eux présentaient des nouveautés particulièrement intéressantes: Sagita Helicopter (www.sagita.be) et GD Tech présentaient un nouvel hélicoptère biplace révolutionnaire, et Venyo son prototype de FSTD (Flight Simulation Training Device) de Boeing 737-800.
GD Tech (www.gdtech.eu) est un bureau d’étude qui travaille pour des industriels du secteur aérospatial, et compte pami ses clients SAFRAN et Techspace Aero. Ils apportent leur support et leur expertise au projet d’Hubert Antoine, le concepteur de l’hélicoptère ULM biplace Sagita Sherpa, dont une maquette grandeur nature était exposée. Sa particularité: l’air est capté à l’arrière du fuselage et est compressé. Une partie de l’air compressé alimente le moteur, le reste le contourne, est mélangé avec les gaz d’échappement, et atteint une température de 100° C. L’air chaud compressé est alors envoyé vers les rotors aux deux turbines Ljungström contra-rotatives. Chacune de ces turbines propulse directement l’un des deux rotors co-axiaux. L’air est ensuite éjecté via une ouverture dans le disque situé entre les deux rotors. Le système de transmission ne demande aucune lubrication, aucun refroidissement et pas de rotor de queue. Une attention particulière a été portée au profilage de la machine et améliore les performances en consommation et en vitesse. Comparé à un hélicoptère classique, on utilise une transmission pneumatique plutôt que mécanique, ce qui permet un gain en poids et évite la complexité des mécanismes classiques. Les objectifs déclarés sont simplicité, légèreté et sécurité. Le projet bénéficie du soutien de la Région Wallonne, et le prototype sera monté dans les ateliers du WAN (Wallonie Aerotraining Network, www.wan.be) à l’aéroport de Charleroi. Le premier vol devrait avoir lieu en 2015. Une maquette au 1/5 a déjà permis d’évaluer les possibilités de ce projet qui a suscité beaucoup d’intérêt au Salon.
La maquette grandeur nature de l’hélicoptère Sagita Sherpa était la vedette du stand de GDTech. Son fuselage est réalisé en carbone epoxy. |
Quelques unes des vedettes du Salon exposées au statique: le Bombardier Global Express 6000, le Boeing 787 de Qatar Airways, l’Airbus A380 aux couleurs de British Airways. |
Venyo Europe (www.venyo.aero) présentait en primeur au Salon le prototype d’un simulateur Boeing 737NG. Jean-Claude Streel, Business development Manager, et Fabrice Cornet, chef de projet, sont partis d’un constat. Il y a actuellement une inadéquation entre les besoins des utilisateurs (compagnies aériennes, pilotes, centres de formation) et l’offre actuelle en simulateurs. Ceux-ci sont devenus très sophistiqués mais aussi très chers tant à l’achat qu’à l’exploitation et les compagnies aériennes ainsi que les écoles de pilotage cherchent à diminuer leurs coûts sans que disparaisse pour autant la nécessité de formation de pilotes. Suite à plusieurs années de recherches ciblées sur les besoins, et après une étude de faisabilité, un financement en partie privé et en partie de la Région Wallonne permet le développement et la fabrication d’un prototype de simulateur Boeing 737NG. Et celui-ci est le premier simulateur professionnel à être opéré au Salon car il est facilement transportable et ne nécessite pas de source d’énergie externe. La mise en œuvre d’un simulateur classique nécessite entre six semaines et deux mois avant d’être opérationnel. Ici, le prototype du « flight training simulation device » (FSTD) Boeing 737-800 de Venyo, monté sur roulette était opérationnel sur le site du Salon 48 heures après son arrivée à Paris.
Le prototype du « flight training simulation device » (FSTD) Boeing 737-800 de Venyo, monté sur roulette était opérationnel sur le site du Salon 48 heures après son arrivée à Paris. |
Illustrant la participation de nombreuses PME super-spécialisées, la firme belge AMOS conçoit et fabrique de télescopes et de miroirs pour satellites, et emploie 80 personnes à Angleur. |
BARCO est un fidèle des salons aéronautiques et présentait sa gamme complète d’écrans de cockpit tant pour applications civiles que militaires, sur avion ou sur hélicoptères. |
La certification FNPT2-MCC est demandée à la Direction Générale du Transport Aérien belge. Venyo est d’ores et déjà une « accredited training organisation » (ATO) selon les normes EASA et prévoit d’exploiter en propre ses deux premiers FSTD, mais planifie la fabrication dans les deux prochaines années d’une trentaine d’unités destinées au marché tant des compagnies aériennes que des centres de formation. Les premiers devraient être prêts à la livraison avant fin 2014. L’objectif est de rendre ce simulateur accessible à tous, dans une formule de Pay Per Use. La compagnie aérienne ou le centre de formation qui a besoin de simulateur(s) ne doit donc plus considérer soit l’achat et les frais généraux d’exploitation correspondants, soit des déplacements onéreux en coûts et immobilisations de personnel s’il faut aller dans des centres de formation éloignés. La formule proposée par Venyo est d’offrir un service complet, comparable à ce qui s’est fait dans le marché de la photocopieuse, comprenant non seulement la mise à disposition du simulateur, mais aussi de tout ce qui l’entoure (entretien notamment). Ses trois arguments fondamentaux sont la formule « Pay Per Use » (opérationnel dans les 48 heures), sa mobilité, et sa capacité pédagogique supérieure (nombre infini de pannes simulables) alors que les simulateurs traditionnels sont limités dans le nombre de pannes possibles.
SABCA exposait des éléments de son savoir-faire en mécanique de haute précision et est un des fournisseurs des programmes Airbus tant civils que militaire. |
Techspace Aero, qui fait partie du groupe SAFRAN, joue un rôle important dans la fabrication d’éléments de moteurs de la maison-mère et aussi de General Electric. |
La Vlaamse Ruimtevaartindustrie/Flemish Space Industry regroupe pas moins de 27 partenaires actifs dans le secteur aérospatial. |
Satisfaction de la part des exposants, succès commerciaux et contacts multiples dont les effets se feront sentir dans les prochains mois, les participants belges à ce 50ème Salon International de l’Aéronautique et de l’Espace ont brillament exposé le savoir-faire d’une industrie de haute technologie et les possibilités de développement de nouveaux concepts. Les organismes publics régionaux flamands et wallons ont travaillé conjointement pour arriver à cette réussite que fut le stand belge au Bourget.
Texte et photos : Guy Viselé