NH90, première belge!

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Beauvechain, le 19 juillet 2013. Le service informations et relations presse de la Composante Air de la Défense avait organisé impromptu une conférence de presse à l’occasion de l’arrivée sur le sol belge du premier NH90 dans sa version TTH (Tactical Transport Helicopter). Celui-ci s’était posé la veille à Beauvechain, escorté par un Agusta A109 et un SIAI-Marchetti SF260, en provenance de l’aérodrome du Luc-Le Cannet des Maures en Provence où se déroule depuis le début de l’année la formation des pilotes du nouvel hélicoptère. Le but de ce long déplacement était de montrer la nouvelle acquisition des forces armées belges au public lors du traditionnel défilé aérien de la fête nationale, d’autant plus éclatante cette année qu’elle célébrait l’intronisation du Roi Philippe Ier, le premier Roi de Belgique (sinon au monde) à détenir aussi un brevet de pilote de chasse et d’hélicoptère.

Premier vol en Belgique, sous un soleil tropical, du NH90 TTH immatriculé RN05 à Beauvechain le 19 juillet 2013.

Le NH90: un concept et ses déclinaisons
Le Ministre de la défense et vice-premier ministre Pieter De Crem et le chef des forces armées belges, le Général Aviateur Gérard Van Caelenberge, rehaussaient la cérémonie de leur présence. Après l’allocution du Ministre de la défense, le Lieutenant-colonel Aviateur Jean-Didier Vandezande, manager du programme NH90 pour la Belgique, présenta le projet de façon claire et bien structurée en termes de possibilités opérationnelles des deux types de NH90, à savoir le TTH et le NFH (NATO Frigate Helicopter) qui seront mis en service au sein de la Composante Air Belge.

Lors de la conférence de presse consacrée à la présentation du NH90 TTH, de gauche à droite: le Général Aviateur Gérard Van Caelenberge, général en chef des forces armées belges, le Ministre de la défense et vice-premier ministre Pieter De Crem et le Lieutenant-colonel Aviateur Jean-Didier Vandezande, manager du programme NH90 pour la Belgique.

L’avantage de cette nouvelle acquisition militaire réside dans le concept commun déclinable en diverses versions optimisées pour des missions bien définies, une approche qui ne peut que rentabiliser l’investissement et les coûts d’exploitation (maintenance, stocks de pièces de rechange, etc.) tout autant que faciliter l’interopérabilité entre les nombreuses forces aériennes de l’OTAN utilisant l’hélicoptère développé par le consortium NHIndustries regroupant les firmes AgustaWestland, Eurocopter et Fokker.

Le tronc commun à toutes les versions du NH90 comporte de nombreuses facettes, outre la motorisation avec deux turbines Rolls-Royce Turboméca RTM 322-01/9. Toutes les versions demeurent néanmoins multirôles, même si elles sont optimisées pour des missions spécifiques, et ce moyennant le montage de modules d’adaptation. La cellule et les pales des rotors sont construites en matériaux composites, offrant un sérieux gain de poids par comparaison au métal, tout en évitant aussi l’usure des composants par une résistance accrue aux vibrations et à la corrosion. Parallèlement, tous les NH90 disposent de commandes électriques du dernier cri (fly by wire) plus efficaces et requérant moins d’entretien que les commandes classiques. Le fuselage est également formé de panneaux composites plats présentant des arêtes, une configuration favorisant une faible signature radar, vitale en conditions opérationnelles réelles. Toutes les versions du NH90 disposent encore de deux grandes portes latérales coulissantes et d’une trappe arrière rabattable permettant un accès aisé à la soute de même que le chargement facile, en autres, de véhicules légers du type jeep. Sans établir l’inventaire exhaustif de tous les éléments et détails techniques, il convient de signaler que le tableau de bord comporte des écrans d’affichage numérique des données de vol ainsi que des instruments analogiques, chacun des systèmes étant disponible en double pour deux cents pour cent de sécurité, en outre les instruments sont compatibles aux NVG (night vision goggles ou lunettes de vision nocturne) intégrées aux casques des pilotes.

La taille du NH90 TTH est impressionnante et l’hélicoptère montre bien, sur ce cliché, l’une des deux portes latérales et la trappe arrière d’accès à sa vaste soute pouvant accueillir 20 hommes de troupe ou 2 véhicules légers ou 2.500 kg de fret.

Sur un plan plus strictement militaire, il est à noter que les sièges des pilotes, des membres d’équipage et des passagers confectionnés avec des matériaux composites résistent à l’impact en cas de crash et que, sur option, ceux des pilotes peuvent être blindés. L’hélicoptère dispose aussi de pivots montés dans les structures des portes latérales, lesquels peuvent accueillir une mitrailleuse légère ou lourde (respectivement de calibre 7,62 mm et 12,7 mm).

NH90 TBEA (Transport BElgian Army)
L’accent était donc mis sur le NH90 présenté dans sa version TTH dont le premier exemplaire belge immatriculé RN05 est sorti d’usine à Marignane (Marseille) le 21 décembre 2012 pour rapidement rejoindre la base ALAT (Aviation Légère de l’Armée de Terre) française au Luc pour procéder à l’entraînement au pilotage des militaires belges. Cet appareil, tête de série des quatre TTH belges, est donc optimisé pour les missions de transport tactique et, à ce titre et comme le précise le Lieutenant-colonel Aviateur Vandezande, il peut emmener dans sa soute spacieuse et facilement accessible jusqu’à 20 soldats équipés pour le combat ou 12 civières (en version MEDEVAC ou d’évacuation médicale) ou encore du fret à concurrence de 2.500 kg au maximum. L’appareil dispose encore d’un crochet pour le transport sous élingue d’une charge pouvant aller jusqu’à 4 tonnes. L’équipement se complète encore d’un treuil capable de lever une charge de 270 kg.

Gros plan sur le nez de l’engin avec son bec recourbé au-dessus du radôme noir de son radar météo; son immatriculation RN05 est bien visible juste sous la vitre du cockpit.

Les sièges de l’équipage sont blindés et celui-ci dispose d’un radar météo dans le nez. Le NH90 TTH belge dispose de nombreux moyens d’autodéfense consistant en un destructeur des émissions infrarouges à l’échappement des moteurs (protection contre les engins se guidant sur les sources de chaleur), d’un lance-leurres thermiques et métalliques et d’une suite de protection intégrant LWR (Laser Warning Receiver ou détecteur de menaces par laser), MLD (Missile Launch Detector ou détecteur de lancement de missiles) et RWR (Rear Warning Receiver ou détecteur de menaces venant de l’arrière), outre les désormais classiques coupe-câbles. Ses nombreux systèmes dédoublés et sa cellule en matériaux synthétiques lui confèrent une grande résistance aux tirs hostiles et au crash, gage de plus grande survivance des équipages.

En approche pour venir se poser, le NH90 est à l’aplomb d’une rangée de neuf Alphajet face aux hangars; ces avions sont à Beauvechain pour tirer les fumigènes tricolores qui ouvrent le défilé du 21 juillet.
Vue de face du TTH avec son train d’atterrissage sorti.

Bien qu’optimisé pour le transport tactique, et donc le support aux combattants, le TBEA peut également être investi de missions de support national ou international (en cas ce catastrophes majeures, par exemple). Moyennant quelques adaptations rapidement réalisables, le NH90 TTH peut se livrer à des évacuations de blessés (CASEVAC) ou aux transports médicaux (MEDEVAC) ainsi qu’aux missions en tant que poste aérien de commandement.

Si les missions de sauvetage des équipages descendus en territoire ennemi ne sont pas prévues pour les hélicoptères belges, le Lieutenant-colonel Vandezande précise que le module CSR (Combat Search and Rescue ou RESCO à l’Armée de l’Air) peut permettre à bref délai aux NH90 d’effectuer ce type de mission; par ailleurs, ce sont surtout les Français et leurs hélicoptères Caracal et les Britanniques avec leurs Chinook qui, au sein de l’OTAN, sont les grands spécialistes en la matière.

Pour l’heure, le seul NH90 TTH livré le 21 décembre 2012 p accumulé 86 heures de vol consacrées aux essais et à l’instruction des techniciens du 13 janvier au 13 avril et des équipages de mai à juillet 2013. Un second appareil devrait être livré fin juillet ou début août et mis en opération au Luc; il est prévu que ces deux machines rejoignent la Belgique fin septembre. Les deux derniers NH90 TTH devraient être livrés directement en Belgique dans le courant de 2014.

Après leur vol inaugural à bord du NH90 TTH/RN05, le Général Aviateur Gérard Van Caelenberge et le Ministre Pieter De Crem sont visiblement satisfaits.

NH90 NBEN (Naval BElgian Navy)
La version du NH90, attendue impatiemment, est la NFH (NATO Frigate Helicopter) qui, tout en étant fondamentalement multirôles, est optimisée pour les missions de recherche et de sauvetage en mer (SAR) et de soutien aux frégates de classe M de la composante maritime des forces armées. Outre le tronc commun aux NH90 et ses spécificités SAR, cette version est encore à même d’assumer les rôles de surveillance et de contrôle maritime (entre autres anti-pollution et anti-piraterie) ainsi que MEDEVAC et CASEVAC, mais en l’occurrence avec 9 civières seulement et de transport (limité à 14 passagers, outre les trois ou quatre membres d’équipage).

L’équipage du RN05 lors de son vol de présentation à Beauvechain.
Gros plan sur le tableau de bord du NH90 TTH avec ses écrans d’affichage des paramètres de vol et instruments analogiques; à l’extrême droite et au milieu de la photo, on aperçoit la commande de pas cyclique du rotor.

Les équipements inhérents aux missions typiques du NH90 NBEN comprennent un système EMI/EMC de communication et de navigation compatible avec celui des navires, des hublots bombés pour faciliter l’observation visuelle, une console TACCO/SENSO (navigation et capteurs tactiques) en cabine. L’avionique comporte un FLIR tactique (Forward Looking Infrared) avec interface avec le radar de bord tactique à balayage à 360°, une liaison de données (Data Link) et de télébriefing. Le NFH90 est également doté d’une panoplie de moyens d’autodéfense composée d’une suite EWS (Electronic Warfare System ou système de guerre électronique) intégrant des détecteurs de menaces et leurs contre-mesures, telles que lance-leurres thermiques ou de brouillage de radars des engins hostiles.

Les équipements à caractère spécifiquement naval, et donc distinctifs de la version TTH, englobent le repliage motorisé des pales de rotor et de la section arrière (celui du TTH se fait manuellement) ainsi que d’un dispositif d’amarrage au pont de la frégate et d’un autre permettant de manœuvrer l’hélicoptère du pont vers son hangar et vice-versa. Enfin, le NFH90 dispose d’un système automatique de flottaison en cas d’amerrissage forcé, mais le TTH en dispose également.

Le Major Aviateur Frank De Wolf, le premier pilote belge qualifié sur NH90, est interviewé par le journaliste de VTM.

Tous les NFH90 belges seront assemblés à l’usine Eurocopter de Donauwörth en Allemagne, le premier est sorti des chaînes de montage le 17 mars 2013 muni du code RN01 belge et 98+51 allemand. Il a effectué son premier vol le 5 avril et comptabilise à ce jour 25 heures de vol; sa livraison est officiellement prévue pour le 31 juillet et la machine ralliera Marignane dès le 13 août 2013 pour permettre la formation des mécaniciens et pilotes à la maîtrise de leur nouvelle monture à partir du 13 septembre 2013 jusqu’au 14 avril 2014. Les trois autres NFH90 commandés devraient être livrés à Coxyde courant 2014 où les Sea King et Alouette III attendent impatiemment la relève.

Etant donné que les marines française et néerlandaise alignent également des NFH90 aux mêmes standards en termes d’avionique et de possibilités opérationnelles, il peut être affirmé que l’interopérabilité des hélicoptères OTAN en action sur la façade Atlantique n’aura jamais été aussi grande.

Le copilote et commandant de bord du NH90 TTH lors de son vol inaugural était le Lieutenant-colonel Aviateur Michel Gelders, futur commanding officier de l’escadrille des NF90 TTH qui sera basée à Beauvechain.
Gros plan sur la cocarde du RN05 qu’on peut vraiment qualifier de « low viz » ou basse visibilité.

Le contrat d’achat belge portant sur 8 NH90 (4 TTH et 4 NFH) ainsi que sur deux options a été signé le 18 juin 2007: il est donc indéniable que tout le programme a pris un sacré retard imputable à l’avionneur. Du reste, chaque hélicoptère coûtant 39 millions d’euros, la transaction globale porte donc sur un montant de 312 millions d’euros, duquel on peut déjà soustraire quelque 10 millions de pénalités de retard à charge du fournisseur. Si cela satisfait quelque peu le ministre des finances, le ministre de la défense et les militaires de la composante air, et plus particulièrement de la 40ème escadrille de Coxyde et du Wing Heli de Beauvechain, voient arriver avec grande satisfaction le bout du tunnel grâce à leur rééquipement avec un appareil à la pointe des technologies et aux capacités opérationnelles considérables.

Voir également sur ce site l’article « Le premier NH90 livré… enfin! » paru début 2013, www.hangarflying.eu/fr/content/le-premier-nh-90-livr%C3%A9%E2%80%A6-enfin)

Texte et photos : Jean-Pierre Decock

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Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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