Desert Falcon, premier bilan

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Evère, le 24 avril 2015. La DG Com du Ministère de la défense avait organisé un point presse en ce qui concerne les opérations spéciales, extérieures et intérieures, dans lesquelles les Composantes Terre et Air étaient impliquées. La séance était présidée, pour ce qui concerne l’aspect aérien des interventions, par le Général-major Aviateur Frederik Vansina, commandant de la Composante Air, secondé par le Major Aviateur Olivier Van Eeckhoudt. Si les forces armées, essentiellement la Composante Terre, ont dépêché 646 militaires dans sept zones d’intervention (dont la Belgique en y mobilisant 230 militaires dans le contexte de la lutte contre le terrorisme), la Composante Air concentre ses activités extérieures sur l’Irak, nonobstant une participation conséquente avec quatre F-16AM à l’exercice « Enhanced Air Policy Missions » en faveur des pays baltes membres de l’OTAN depuis la base de Malbork en Pologne

Déclenchement inopiné
C’est fin septembre 2014 que six F-16AM du 2ème wing tactique de Florennes furent envoyés par le gouvernement en Jordanie aux fins de combattre aux côtés des alliés, le terrorisme de l’Etat Islamique autoproclamé. Les chasseurs-bombardiers belges furent basés à Azraq, plate-forme de la Royal Jordanian Air Force au nord-est de cette contrée. L’opération « Desert Falcon » – dans le cadre multinational de « Inherent Resolve » – mobilise 110 personnes, pilotes compris.

Les six premiers F-16AM du 2ème wing tactique de Florennes à leur arrivée sur la base d’Azraq en Jordanie fin septembre 2014.

Malgré le climat hostile et la topographie ingrate de la zone d’intervention de nos aviateurs, ceux-ci assurent des missions éprouvantes, car chacune dure en moyenne 4 heures 30 avec plusieurs ravitaillements en vol et une panoplie offensive accrochée sous les ailes des avions, en plus du pod de contre-mesures et de désignation des objectifs flanqué le long du fuselage de leur appareil. De fait, le temps de vol minimum entre le décollage jusqu’à l’arrivée sur zone hostile est d’une heure environ à la vitesse moyenne de 750 km/h.

Missions bien encadrées
Les missions exécutées par les pilotes belges englobent l’appui offensif des éléments au sol (close air support / direct support of troops), les frappes d’interdiction sur objectifs loin derrière la ligne de front (strike) et enfin les reconnaissances aériennes. Chaque mission représente deux sorties, car deux F-16 au moins y participent systématiquement. Ces patrouilles survolent quasi quotidiennement la région kurde et les villes clés de Tikrit, Kirkouk et Mossoul, aux confins nord-est du territoire irakien. Elles interviennent toutefois aussi à distance plus proche, c’est-à-dire l’espace fluctuant du front à l’ouest et au sud de Baghdad. Leur travail dans ces régions troublées consiste principalement à détecter et à attaquer des cibles mobiles (kinetic targets), en l’occurrence surtout des véhicules 4×4 armés.

 

Sous une arche de protection contre l’ardent soleil jordanien, ce F-16AM équipé de missiles AIM-120, AIM-9 et Maverick appartient probablement à la Royal Jordanian AIr Force.

Une mission capitale exécutée avec plein succès par les F-16 belges fut la destruction d’un centre de commandement des forces terroristes implanté à Tikrit. Mais la mission la plus remarquable fut incontestablement celle menée début 2015 par neuf avions de la coalition sous le leadership de deux F-16 belges. Il s’agissait du bombardement d’une usine de fabrication d’armement de l’EI située profondément en territoire ennemi. Les ravitaillements en vol du dispositif offensif, les informations glanées par un drone et celles transmises par les AWACS (Airborne Early Warning And Control System) en temps réel permirent au leader belge de l’escadrille de neuf avions alliés d’accomplir la mission avec grand succès. Des neuf bâtiments ciblés, quatre constituaient les objectifs prioritaires dont la destruction devait entraîner celle des hangars annexes non visés directement. Les bombes GBU 38 à guidage GPS furent mises dans le mille, réduisant l’usine ennemie en gravats.

Une organisation efficace
Les rotations du personnel navigant se font sur base mensuelle, c’est-à-dire après approximativement 25 missions générant une bonne centaine d’heures de vol de guerre… avec le stress et la fatigue nerveuse autant que physique qui s’ensuit. Signalons qu’un tour d’opérations des équipages de bombardiers durant la dernière guerre mondiale comptait 25 missions à l’ennemi, après quoi ledit équipage était d’office retiré des opérations et mis au repos. Bien que les situations ne soient pas strictement comparables, elles apportent néanmoins un éclairage révélateur sur les prestations de nos pilotes ainsi que de leurs mécaniciens et armuriers oeuvrant au sol…

Le F-16AM FA-116 en Jordanie; en troisième point sous voilure, on peut voir une bombe GBU-38 de 500 livres (250 kg) à guidage par GPS.

Par ailleurs, ce type de rotation permet aux effectifs des 2ème et 10ème wings tactiques de la Composante Air de s’entraîner dans des conditions réelles, leur procurant ainsi une expérience sans équivalent. La mission se terminant fin juin 2015 (sauf prolongation et rallonge de budget à décider par le gouvernement), une vaste majorité de nos pilotes et techniciens spécialistes devraient ainsi avoir eu l’opportunité, durant une période de près de dix mois, d’accroître considérablement leur savoir-faire opérationnel au combat.

Résultats plus que satisfaisants
L’opération « Desert Falcon / Inherent Resolve »a débuté il y a huit mois et le bilan du détachement aérien belge qui y participe est très éloquent. Nos aviateurs ont en effet accompli durant ce laps de temps quelques 300 missions représentant 2.640 heures de vol avec munitions « bonnes de guerre ». Ils ont attaqué 107 objectifs mobiles et d’importantes installations ennemies, ces prestations représentent un apport de 5% dans les actions de la coalition, et ce sans le moindre « dommage collatéral ».

Départ en mission en octobre 2014 du FA-116 à partir de l’aérodrome de Mazraq, au nord-est de la Jordanie.

Les pilotes belges ont effectivement démontré qu’ils sont compétents et bien entraînés et leur savoir-faire est unanimement reconnu par les partenaires de la coalition : ils méritent pour le moins un grand coup de chapeau !

Jean-Pierre Decock
Photos émanant de la DG Com de la Défense

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Jean-Pierre Decock

Brevet B de vol à voile en 1958. Pilote privé avion en 1970. Totalise 600 heures de vol dont 70 d’acro. Un œil droit insuffisant empêche toute carrière dans l’aviation. (Co-)Auteur et traducteur de 41 ouvrages d’aviation publiés en 4 langues depuis 1978. Compétences: histoire, technique et pilotage (aviation civile, militaire ou sportive).

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