Bruxelles, le 27 octobre 2016 : le livre rédigé par le Général de Brigade Aviateur retraité Guy Van Eeckhoudt vient de me parvenir. C’est une « brique » de près de 400 pages que je m’empresse de feuilleter, ce qui ne fait que m’inciter à le lire, ce que je fais sans tarder et avec gourmandise… tant est manifeste le talent de narrateur de l’auteur.
Il aborde les nombreux pans de sa carrière à la Force Aérienne, entamée il y a près de 40 ans, en pleine guerre froide. Son récit couvre les questions de fond de l’époque, mais il est également truffé d’anecdotes – tantôt joyeuses, tantôt moins – qui en agrémentent et pimentent la lecture. Que de visages, que de noms d’amis remémorés; cela fera chaud au cœur de ceux qui ont servi ou fréquenté la Force Aérienne aux différentes époques évoquées par Guy Van Eeckhoudt, du statut d’élève pilote passant à la chasse pour se poursuivre au sein du transport militaire, où les missions humanitaires en Afrique noire étaient monnaie courante, pour se poursuivre, après la retraite, aux commandes d’un SV4B, biplan vétéran sur lequel il a volé alors qu’il était néophyte du pilotage.
J’avouerais que j’ai particulièrement savouré l’un des premiers chapitres de son ouvrage consacré, au début de sa carrière, à la formation et à la mission d’instructeur sur Fouga Magister au sein de l’Armée de l’Air, plus précisément à Cognac. Dès l’entame de l’ouvrage, Guy Van Eeckhoudt a le don de partager son expérience du pilotage avec le lecteur qui se sent rapidement dans le « back seat » de son avion. Mais ce côté aviation dynamique comporte de nombreux petits récits à l’intérieur du récit principal si bien que l’on découvre la superbe des aviateurs français à laquelle répond un comportement plutôt « poil à gratter » de la part des pilotes belges.
L’expérience de Guy Van Eeckhoudt est riche de quelques années passées aux commandes du légendaire F-104G Starfighter de la 350ème escadrille au sein de laquelle son père, le « Grand Van », avait servi durant la 2ème guerre mondiale. Réaffecté à la formation sur T-33 suite à un problème médical le privant de l’accès au F-104G, il enchaîne en devenant le chef de corps de l’école de pilotage élémentaire de Gossoncourt. Il occupe ensuite diverses fonctions d’état-major pour des périodes variables, tel étant le sort des officiers supérieurs.
C’est fin 1992 qu’il prend le commandement du 15ème wing de transport. C’est la décennie où les troubles se multiplient à haute fréquence en Afrique, pas seulement au Zaïre, mais également en Afrique orientale et au Rwanda. C’est dans ce pays, devenu tristement célèbre par son génocide, que dix paras belges sous commandement des Nations Unies sont froidement abattus. En mars et avril 1994, Guy Van Eeckhoudt y était commandant et coordinateur des moyens aériens déployés à Kigali, tant par les Belges que les nations alliées. Au plus fort de ce qui était devenu une véritable guerre civile et alors qu’il était pris entre les feux croisés des factions rivales à l’aérodrome de Kigali, Guy Van Eeckhoudt est parvenu à assurer le décollage du C-130H français devenu la cible des mortiers rwandais et à extraire plusieurs milliers de ressortissants belges et européens du Rwanda en pleine ébullition. Il a également évacué le 2ème bataillon para-commando, relevé de la tutelle de l’ONU, ainsi que ses véhicules; une opération pas particulièrement aisée… Guy Van Eeckhoudt en relate les péripéties de façon haletante, en « direct life ». C’est du vécu à chaud mais géré avec sang-froid par un (grand) chef de corps… Ce chapitre éminent du livre est à lire absolument, car de tels comptes-rendus avec mise en perspective des événements sont rares, parce que généralement absents des mass médias.
Lockheed F-104G Starfighter du 1er wing de chasse de Beauvechain en déploiement à Solenzara (Corse) pour une période d’exercice au tir air-air. (Archives Jean-Pierre Decock) |
Le sujet sensible, source de polémiques, est le tragique accident du C-130H Hercules immatriculé CH-06 du 15ème wing à Eindhoven en juillet 1996 dans lequel périrent 34 personnes, dont les quatre membres de l’équipage. Guy Van Eeckhoudt, à l’époque Colonel et commandant du 15ème wing, expose les faits avec objectivité et remet les pendules à l’heure quant aux dénigrements de certains malintentionnés vis-à-vis de la Force Aérienne et qui furent relayés par la presse.
Une autre constante de cet imposant ouvrage réside dans le fait que l’auteur n’oublie et n’omet jamais de parler des nombreux individus qui l’ont aidé ou secondé ou qui étaient placés sous ses ordres. Guy Van Eeckhoudt prouve ainsi que la gratitude incite à l’optimisme et à se focaliser sur ce qui réjouit plutôt que sur ce qui manque.
Pour moi ce livre est un must et je ne puis donc que le recommander sérieusement à tout amateur de récits d’aviateurs, forcément militaires et forcément belges, relatant des événements contemporains dans un style agréable. De plus, son prix est loin d’être rédhibitoire, alors procurez-vous votre exemplaire sans attendre, sa lecture vous ravira à coup sûr !
Jean-Pierre Decock
« Journal d’un pilote belge de la guerre froide aux interventions humanitaires en Afrique » par le Général de Brigade Aviateur e.r. Guy Van Eeckhoudt, un volume de 384 pages au format A4 sous couverture souple illustré de nombreuses photographies en noir et blanc.
Commande chez l’éditeur Studio Royal Print par virement au compte BE92 001192297223 de la somme de 35 euros pour la Belgique et 40 euros pour la France (frais d’envoi postal compris) en mentionnant « Van Eeckhoudt ».
Plus d’infos sur www.lelivrebelge.be