La SABCA a 100 ans

Le siège de la SBACA à Haren dans les années vingt. (Photo Charles Mali)

Bruxelles, le 16 décembre 2020. C’est au siège social que Thibauld Jongen, CEO de la SABCA, avait invité la presse pour commémorer les 100 ans de la prestigieuse « Société Anonyme Belge de Constructions Aéronautiques ». Ce centenaire aurait dû être l’occasion d’une grande fête mais la crise du COVID-19 est passée par là et la commémoration s’est résumée au strict minimum. La réunion ne manquait cependant pas d’intérêt pour « évoquer le passé et se tourner vers l’avenir » pour reprendre les propos du CEO. Mais ce n’est que partie remise pour faire la fête dès que les temps seront meilleurs…

Thibauld Jongen, le CEO de SABCA. (Photo Robert Verhegghen)
Le siège de la SBACA à Haren dans les années vingt. (Photo Charles Mali)
En plus d’avoir conservé son nom depuis cent ans, la SABCA a toujours son siège social et des ateliers à Haren-Evere près du nouveau siège de l’ OTAN. (Photo Charles Mali)

Un anniversaire dans la discrétion

Il y a cent ans jour pour jour, la Société Anonyme Belge de Constructions Aéronautiques (SABCA) était fondée, jouant dès lors un rôle de pionnier dans la conquête de l’air et de l’espace et devenant une référence internationale encore un siècle plus tard. Nous avons déjà eu l’occasion de raconter cette année dans Hangar Flying l’histoire de la SABCA au travers d’un article en trois parties fort documentées, que nous invitons le lecteur à (re) découvrir s’il ne l’a déjà fait. Rappelons que c’est avec un livret de 47 pages que Georges Nélis, commandant de l’armée belge, a convaincu le gouvernement de développer une industrie aéronautique civile et militaire autonome en Belgique. Il a fondé SNETA (Syndicat National pour l’Étude des Transports Aériens) afin d’étudier la faisabilité de ce projet. En peu de temps, les rêves, les idées et les études de ces pionniers sont devenus réalité. En 1923, peu de temps après la fondation de SABCA naissait la SABENA. En quelques années la Belgique avait entre les mains une entreprise de construction et de maintenance d’aéronefs et une compagnie aérienne. Cent ans plus tard, la passion des premiers temps n’a pas faibli. « Sachant qu’à travers notre métier, nous contribuons à lancer des satellites et faire voler des avions et des drones sans faille, donne un immense sentiment de satisfaction. Nous avons tendance à l’oublier au quotidien, mais nous réalisons des prouesses dont nous pouvons être fiers » déclare Thibauld Jongen, PDG de SABCA.

La société célèbre son centenaire avec un ouvrage photographique exclusif et en édition limitée. (Photo Robert Verhegghen)
Une bande dessinée de qualité retraçant l’histoire de la société a également été éditée à l’occasion des 100 ans. (Photo Robert Verhegghen)

L ‘alliance des secteurs industriels, publics et scientifiques

Afin d’évoquer les défis du futur, l’ « industriel SABCA» s’est associé pour cette commémoration avec le « public » et le « scientifique » au travers de deux organismes presque centenaires mais moins visibles représentés par Koen Milis de la « Direction Générale du Transport Aérien » (DGTA), l’organisme fédéral qui gère l’aviation dans notre pays et Peter Grognard, le directeur général du moins connu « Von Karman Institute for Fluids Dynamics »(VKI) dont les installations datant des années vingt sont situées à Sint-Genesius-Rode (www.vki.ac.be/).

L’arrivée du nouveau directeur général de la DGTA, M. Koen Milis, reprenant un siège laissé vacant très longtemps, a été accueillie avec soulagement par le secteur de l’aviation en Belgique tant les challenges auxquels ses départements doivent faire face sont nombreux et complexes. (Photo Robert Verhegghen)

La DGTA

Dans les années vingt, avec les Pays-Bas, la Belgique est devenue le premier État à disposer d’une législation aéronautique, législation dans laquelle le gouvernement avait une politique de vision clairement axée sur l’avenir et se disait prêt à faire des investissements importants pour le développement de l’aviation. Les changements rapides de l’industrie ont conduit l’administration à devoir s’adapter continuellement aux nouveaux développements, une réalité encore aujourd’hui. La DGTA compte aujourd’hui 150 personnes. Elle annonce pour 2021 la publication d’un « livre blanc sur l’aviation belge » avec une vision d’avenir pour tous les acteurs. Ce document visera à fournir aux décideurs les informations nécessaires pour aider l’aviation à survivre à l’ère post-Covid. L’étroite collaboration entre l’industrie et les universités, qui a toujours été un gage de succès, sera l’une des sources de ce livre fort attendu.

Le « Von Karman Institute for Fluids Dynamics »

C’est un grand bâtiment blanc à Sint-Genesius-Rode que les nombreux navetteurs empruntant la chaussée de Waterloo connaissent sans vraiment savoir ce que l’on y fait. Si vous avez lu un jour les « Aventures de Jo, Zette et Jocko », et en particulier « le Stratonef H-22 », peut- être vous rappelez vous les planches ou l’on voit de grandes souffleries, qui ont peut-être inspiré Hergé, le créateur de cette bande dessinée en 1936, par celles du Service Technique de l’Aéronautique (STAé.), le précurseur de l’actuel von Karman Institute (VKI.

Théodore von Karman est un ingénieur aérodynamicien américain d’origine hongroise de renommée internationale. (Photo National Postal Museum)

Le VKI, organisation éducative et scientifique internationale à but non lucratif, est spécialisée dans la dynamique des fluides (flux de liquides, gaz et plasmas) dans le domaine de l’aéronautique et de l’aérospatiale, de la dynamique des fluides environnementale et appliquée, des turbomachines et propulsion. L’histoire du laboratoire remonte à 1922 lorsqu’un premier bâtiment fut érigé pour abriter le STAé. de l’Autorité de l’Aviation Civile alors sous le Ministère de la Défense. Le bâtiment a été conçu pour accueillir une grande soufflerie à basse vitesse de type Eiffel avec un circuit retour ouvert et une section d’essai à jet ouvert de 2 m de diamètre, ainsi que des bureaux et des commerces. Dans les années d’avant-guerre, les services techniques de l’aviation civile basés à Sint-Genesius-Rode étaient chargés de la certification, des essais et de l’inspection des aéronefs ou des composants et équipements d’aéronefs ainsi que des installations aéronautiques au sol. La Belgique était alors engagée dans la conception et la construction d’aéronefs et la soufflerie à basse vitesse était utilisée pour les essais aérodynamiques de modèles ou de composants d’aéronefs.

Après la dernière guerre, le gouvernement belge a décidé de moderniser les installations d’essais aérodynamiques de Sint-Genesius-Rode. 1949 a ainsi vu la construction d’un grand bâtiment spécialement conçu pour abriter un tunnel supersonique et une installation à basse vitesse multi-configuration. L’Institut von Karman a été créé en octobre 1956 dans les bâtiments qui formaient ce qui était alors le laboratoire aéronautique de l’Administration de l’Aéronautique du Ministère belge des Communications. Ce centre a été créé par la Fondation Nationale de la Recherche Scientifique (FNRS) pour compléter l’équipe existante de fonctionnaires exploitant le laboratoire par du personnel scientifique qui collaborerait aux programmes de recherche. Au cours de 1955, Theodore von Karman, qui était président du Advisory Group for Aeronautical Research and Development (AGARD – Groupe consultatif pour la recherche et le développement aéronautique) de l’OTAN, proposa la création d’une institution consacrée à la formation et à la recherche en l’aérodynamique qui serait ouverte aux jeunes ingénieurs et scientifiques des pays de l’OTAN. Avec le soutien des délégués nationaux belges à AGARD, le gouvernement belge accepta d’accueillir la nouvelle institution dans son laboratoire aéronautique à Sint-Genesius-Rode. En 1963 le centre prit son nom actuel en hommage à Théodore von Karman son premier directeur général décédé en 1963.

L’Institut von Karman offre « une formation avancée en recherche par la recherche», explique Peter Grognard, directeur général de VKI.A l’heure actuelle, les scientifiques du VKI travaillent à la conception de l’industrie aérospatiale du futur. Ils étudient une nouvelle génération d’avions très silencieux, économiques et des moteurs à l’hydrogène ainsi que sur de petits satellites capables de revenir de manière autonome sur terre. Pour ce faire, ils collaborent avec les institutions académiques ainsi qu’avec les partenaires industriels pour améliorer les processus et les résultats. Nous aurons certainement l’occasion de revenir prochainement plus en détails sur cette intéressante institution scientifique.

La nouvelle unité Unmaned Aerial Systems de la SABCA met l’accent sur les missions à haut risque et s’adresse à des clients qui ne font pas partie de l’industrie aéronautique, mais qui doivent être en mesure de répondre à toutes les exigences de qualité de l’aviation, comme p.ex. l’inspection des centrales nucléaires et des éoliennes ou le transport de matériel médical. Ici un drone X8 Helicus. (Photo SABCA)

Le futur SABCA est présente sur de nombreux marchés et a évolué de concert avec les technologies et la demande de ses clients industriels. Cela se traduit notamment par sa nouvelle unité Unmanned Aerial Systems, qui développe des systèmes permettant aux drones de voler de manière autonome dans l’espace aérien. L’industrie aéronautique a toujours été confrontée à de nouveaux défis, ce qui nécessite résilience et inventivité. Avec Blueberry, le nouvel actionnaire réunissant SABCA et SABENA Aerospace, la SABCA entend investir en tant qu’industrie dans les années à venir, pour rester en tête du classement mondial, notamment dans la digitalisation des processus de production, à la recherche étendue sur les composants légers et électriques pour les appareils verts de demain et à la conservation des connaissances en Belgique grâce à une excellente formation et des développements pionniers en renforçant les liens scientifiques , publics et industriels dans notre pays. Bon anniversaire SABCA !

Picture of Bob Verhegghen

Bob Verhegghen

Né au Congo en janvier 1952. Passionné d’avions militaires et de maquettes dès mon plus jeune âge. Auteur de nombreux articles historiques et ou de maquettisme sur la force Aérienne dans diverses revues et dans la revue KIT de l’IPMS Belgium. J’ai un intérêt particulier pour les planeurs anciens, la Force Aérienne d’après-guerre et les T-6, (R) F-84F, et Mirage. J’ai le soucis de l’exactitude et du détail pour mes maquettes. Pilote de planeur depuis 1977, instructeur avec près de 900 heures de vol je suis l’heureux copropriétaire de l’ASK-13 ex PL-66 des Cadets de l’Air (aujourd’hui D-3438) basé à Temploux.

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