Namur, le 8 juin 2022. Notre dernier article consacré à Sonaca Aircraft, publié juste avant le salon Aero 2022 de Friedrichshafen (29 et 30 avril 2022, https://www.hangarflying.eu/2022/04/sonaca-200-la-success-story-belge-continue/), était plus que teinté d’optimisme et célébrait la fabrication du cinquantième exemplaire.
Coup de tonnerre dans un ciel qui paraissait bleu, un communiqué de presse de la maison mère Sonaca, daté du 23 mai, annonçait l’arrêt de la production des Sonaca 200 dont 57 exemplaires ont été construits…
« Le Conseil d’administration de Sonaca a décidé de ne plus financer les activités déficitaires de sa filiale Sonaca Aircraft. Un financement a toutefois été octroyé afin de remplir toutes ses obligations et de faciliter la continuité des activités essentielles aux clients, à savoir les services et l’après-vente. L’ensemble du personnel se verra offrir un emploi au sein du groupe. »
Yves DELATTE, le nouveau CEO de Sonaca justifie cette décision:
“l’arrêt des activités de production de Sonaca Aircraft constitue une décision nécessaire. La pandémie du Covid-19, qui impactera globalement le secteur aéronautique jusqu’en 2025, a fortement affecté l’aviation générale, en particulier les activités liées à la formation et l’écolage des pilotes.” Ceci s’est traduit par un niveau de commandes largement en-dessous du seuil de rentabilité pour Sonaca Aircraft. »
Ces arguments étonnent: Sonaca Aircraft, grâce aux efforts d’une équipe de collaborateurs super-motivés, a su pénétrer avec succès le marché des avions d’écolage, et a aligné quelques références impressionnantes dans son carnet de ventes.
Tout comme notre confrère français Gil Roy l’écrit dans Aerobuzz: « L’annonce de la décision a eu l’effet d’une grenade assourdissante. Le groupe jette l’éponge au moment où la demande en avion-école a rarement été aussi forte. »
Les chiffres de la GAMA indiquent que les livraisons d’avions à pistons ont fait un bond de 14% au premier trimestre 2022, après une hausse de 5,5% en 2021. Et les compagnies aériennes sont confrontés à des problèmes de manque d’équipages pour répondre à la reprise du trafic après deux années de Covid… ce qui se traduit par une reprise forte des activités d’écolage et donc une demande en croissance pour de nouveaux avions d’entraînement.
La décision du groupe Sonaca de se recentrer prioritairement en tant que sous-traitant dans l’industrie aéronautique et spatiale lui fait perdre son statut récent d’avionneur et marque la fin d’un beau chapitre de l’histoire de l’aviation belge. Paradoxalement, ce qui était un des arguments majeurs pour rassurer les clients potentiels de Sonaca Aircraft, à savoir l’appartenance à un grand groupe aéronautique, est devenu son talon d’Achille…
Outre la confiance perdue, les conséquences seront nombreuses. L’aérodrome de Namur, qui a construit le hall d’assemblage et le louait à Sonaca Aircraft, devra trouver une nouvelle affectation pour ce bâtiment. Le support après-vente des avions livrés devra être organisé. Le personnel devrait pouvoir être reclassé au sein du groupe Sonaca, mais avec le cœur lourd… Les intérêts économiques du groupe sont passés prioritairement, clôturant définitivement un chapitre passionnant de l’histoire de notre aviation belge.